A Cité Soleil, des familles fuient la terreur des gangs, des quartiers se vident !
Depuis le déclenchement des affrontements entre gangs rivaux à Cité Soleil, certains quartiers sont vidés de leurs occupants. Des familles ne cessent de fuir le bidonville. Des dizaines d’habitants ont dû quitter leurs maisons, pour ne pas être victimes des représailles des bandits armés.
Retour sur des témoignages poignants de quelques mères de famille, recueillis par le journaliste Luckson SAINT-VIL.
« Mon mari a été blessé par balles. Nos enfants vivent dans la peur. Des hommes armés ont mis le feu dans ma maison. Nous sommes aux abois. La situation était grave ! ». Ces phrases prononcées par Jasmine, donne froid dans le dos. La voix abattue, cette mère de 3 enfants, à travers cette vidéo de 5 minutes publiée sur les réseaux sociaux, affirme avoir vécu l’enfer. Face aux affrontements sanglants, elle explique que les familles couraient dans tous les sens, sans savoir exactement où elles vont.
« Depuis le début des conflits armés, des familles ont dû quitter leurs quartiers d’origine. Des mères accompagnées de leurs enfants, ont passé des nuits au bord de la rue, à la belle étoile. Nous vivions comme des animaux ! », témoigne Emanise. La voix pleine d’émotion, cette habitante de Cité Soleil raconte qu’elle a sauvé de justesse l’un des enfants, sous l’effet du feu qui se propageait dans une maison.
« Pire, des hommes armés ont même volé nos effets personnels, tels lits, réfrigérateurs, télévisions… », souligne cette mère de famille, qui affirme être terrifiée par le stress et le désespoir.
Une autre catégorie de familles avait décidé de se réfugier chez des proches. « Au moment des affrontements, j’ai dû me rendre chez un ami à Pétion-Ville, pour éviter d’être victime. Nous étions dans un véritable concert de cartouche. C’était vraiment dur », se remémore Aline, qui affirme n’être pas prête pour l’instant à retourner dans son quartier. Cette marchande de fritures explique avoir échappé miraculeusement aux tirs, alors que certains de ses proches sont morts ou blessés par balles.
Retour timide, malgré les risques
Entretemps, un retour timide de quelques familles a été constaté, ce jeudi, dans certains quartiers, où un semblant d’accalmie est constaté. Dans ce calme apparent, certaines mères de famille en profitent malgré tout pour regagner leurs domiciles. Si certains décident de se réinstaller, malgré la psychose, d’autres viennent récupérer rapidement certains effets. Parallèlement, une autre catégorie de gens n’ose même pas y mettre les pieds par peur d’être victime.
Les quelques rares familles qui ont signé leur retour, affirment ne pas disposent de moyens économiques nécessaires pour louer de maison. « Nou oblije tounen menm si bagay yo poko klè. Nou pa gen anpil kòb pou nou ta afème yon kay nan lòt zòn. Nou reziye nou », disent-elles.
Dans certains quartiers où des citoyens ont regagné leurs maisons, des petites campagnes de nettoyage ont débuté, en vue de débarrasser les rues de détritus. « Malgré l’incertitude, malgré la peur, nous sommes obligés de garder propre notre quartier. Cependant, si les affrontements reprennent aujourd’hui, nous sommes prêts à quitter pour sauver notre peau. On est ici tout simplement parce qu’on n’a pas d’autre endroit où aller ! », confie un citoyen.
« Nous voulons vivre dans la paix »
Malgré ce semblant d’accalmie constaté depuis environ 2 jours, les habitants se disent angoissés et stressés. Face à ce conflit armé qui a déjà coûté la vie à plus de 10 personnes, ces familles appellent les autorités policières et judiciaires à assumer leurs responsabilités, en vue de faire régner la paix dans la Commune. « Nous ne pouvons pas continuer à vivre dans cette condition. Il est vrai que les conditions économiques sont très précaires, mais nous voulons vivre quand même dans la paix », déclarent plusieurs citoyens contactés par la rédaction d’Haïti Infos Pro.
Ces habitants qui évoquent des raisons politiques pour expliquer ce qui se passe, invitent toutes les couches de la commune à faire front commun, en vue de conscientiser les bandes rivales à déposer les armes. « Nou pa kapab ankò. Nap mande sekou avèk bagay sa a », se plaignent ces familles.
Dépassées, les autorités municipales appellent de leur côté aux interventions de l’Etat central, afin de resoudre les problèmes sociaux et d’offrir une autre voie aux jeunes armés. Un conflit armé qui se déroule sous les yeux impuissants de la police nationale, qui dispose d’un faible effectif par rapport à la population de Cité Soleil, estimé à environ 300 mille habitants.
Rappelons que depuis environ 3 semaines, la commune de Cité Soleil connait une situation de terreur, où des groupes armés s’affrontent. Des membres du groupe armé de Brooklyn dirigé par le nommé « Gabriel », s’affrontent à ceux de Boston, avec comme caïd « Matchas » ainsi connu, qui s’allient à la bande à « Isca » dans le quartier de Belekou.
HIP / Haiti Infos Pro