À la rencontre des familles rescapées de l’attaque armée à Bél-air

Les habitants vivant dans le quartier de Bél-air sont encore habités par le traumatisme, 7 jours après l’attaque armée du 1e Avril 2021. Des pères et mères de famille qui se sont refugiés sur des places publiques ou des terrains de foot affirment avoir vécu l’horreur. A l’intérieur comme à l’extérieur du bidonville, la rédaction a rencontré des familles aux abois, qui lancent un appel à l’aide.

Mercredi 7 avril 2021. C’est un quartier désert. Difficile d’accès. Dans certains coins à Bél-air, les piétons ne s’aventurent pas. Il est déconseillé. Les rares familles qui habitent encore la zone veillent aux grains, et craignent une éventuelle attaque. Parmi ces habitants, Anette, 60 ans, qui a vu sa maison incendiée. « Cela a commencé depuis jeudi. C’était insupportable. Je ne pouvais pas assister à ce qui s’est passé », a témoigné cette Bél-airienne, qui dort actuellement à côté d’une Eglise à Port-au-Prince.

Environ 8 jours après l’assaut des gangs, Anette affirme n’avoir pas vu l’un de ses neveux. « Nou te oblije al channmas, poun akwoupi kò nou yon ti kote. Apresa nou te oblije ale yon lot kote. Nap bat seren depi avan yè », soupire-t-elle, lançant un appel à l’aide à tous citoyens de bonne volonté.

Sa voisine, Gilberte, 83 ans, a elle aussi perdu sa maison, lors de l’assaut du G-9. Depuis, elle s’est refugiée avec les membres de sa famille sur un terrain de football à Solino. « Se kouri yo te kouri avem poum pat viktim. Depi lè sa fin pase a, mwen pa byen », rapporte cette octogénaire.

Sa maison n’a certes pas été brulée, mais Rosemita qui habite à la rue Tirremasse, parle d’une journée sanglante. Elle souligne que jusqu’a date, elle ne peut pas se rendre facilement dans sa maison. « Se aswè nou fe yon jan nou kouri rantre nan kay la poun al pran rad pou timoun yo epi pote pou yo nan abri a Pòs Machan », poursuit Rosemita, qui accuse directement Jovenel Moïse. « Nou di Jovenel ak tout bandi l yo mèsi, paske se nan lari yo lage nou pou n dòmi. Mèsi ! », conclut-elle.

Pour un autre citoyen, ce qui s’est passé à Bél-air est un « massacre d’Etat ». Selon cet habitant, la majorite des cadavres ont été emportés par les gangs du G-9. « Yo atake nou nan 4 pwent. Kisa pèp Bèlè gen ak Jovenel ? », s’interroge-t-il. « Tôt ou tard, Jovenel Moïse paiera de ses actes. Vous serrez poursuivi. Nou bouke ! Nou fatige ! », déclare ce citoyen, accusant le DG a.i de la police, Léon Charles d’être de mèche avec ces gangs armés.

Selon un rapport rendu public mercredi, le Réseau National de Défense des Droits Humains a fait état d’au moins 13 morts et 5 disparus enregistrés suite à cette attaque armée, qui est l’œuvre du groupe armé « G-9 an fanmi ak alye ». « Parmi les cadavres, figurent 3 bandits armés, membre de cette fédération », a informé le RNDDH, qui pointe du doigt le pouvoir en place dans ce qui s’est passé.

Entretemps, la vie s’amenuise à Bél-air. La zone perd son essence et donne l’allure d’un endroit mort. Des citoyens meurent, des maisons partent en fumée, des hommes armés font la loi sous les yeux de Notre-Dame du Perpétuel Secours, patronne de ce quartier mythique, situé a presqu’un jet de pierre du Palais présidentiel.

N.B : Anette, Gilberte et Rosemita sont des noms d’emprunts utilisés par la rédaction, afin de protéger les victimes.

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