Affaire $1.50 : Martelly, Privert, Jovenel , des compagnies privées dans le viseur de la justice américaine

Après avoir été lancé en 2018, le procès relatif au prélèvement des taxes de $1.50 sur les transferts d’argent et de cinq centimes sur les appels téléphoniques entre Haïti et les pays étrangers, a été relancé par la justice américaine. Dans une décision adoptée jeudi dernier, 3 juges fédéraux de New York ont exigé la poursuite de l’affaire. Ce procès avait été lancé suite à une plainte déposée par plusieurs compatriotes haïtiens contre les anciens Présidents Michel Martelly, Jocelerme Privert et Jovenel Moïse, ainsi que des compagnies de transferts et de téléphonies mobiles. Les plaignants accusent ces personnalités et entreprises d’être au cœur d’un stratagème visant à fixer les tarifs des taxes pour les transferts d’argent et des appels téléphoniques entre Haïti et des pays étrangers.

Tout a commencé en 2018, quand plusieurs compatriotes haïtiens parmi eux Odilon Celestin, Widimir Romelien, Goldie Lamothe-Alexandre et Vincent Marazita, ont intenté une action contre 3 anciens Présidents haïtiens et plusieurs compagnie de transfert et de téléphonie mobiles.

Dans leur plainte, ils accusent Michel Martelly, Jocelerme Privert et Jovenel Moïse d’avoir utilisé des stratagèmes pour fixer le prix des appels téléphoniques et des transferts d’argent, afin de financer le Fonds National d’Education (FNE).

Les plaignants affirment également qu’aucun programme éducatif de ce type n’a jamais été créé ou mis en œuvre en Haïti. Rodney Austin, avocat des plaignants, a déclaré au journal Haitian Times en 2019, soit 1 an après la plainte, que la subvention « n’a pas lieu » et a dit qu’il essayait de comprendre où est passé cet argent.

Annoncé en 2010, le programme de subvention devait être financé par le paiement d’une taxe de 1,50 $ sur les transferts d’argent et une taxe de cinq centimes sur les appels téléphoniques internationaux.

Dans la plainte, les citoyens haïtiens pointent du doigt également les compagnies Western Union, Unibank, CamTransfer, Digicel et Natcom. Ces entreprises sont accusés d’avoir participé à ce vaste stratagème visant à fixer les tarifs des taxes pour les transferts d’argent et des appels téléphoniques internationaux.

Selon les plaignants, Michel Martelly aurait orchestré un accord de fixation des prix de grande envergure avec ces entreprises, avant de devenir président en 2011. Le « mécanisme » de mise en œuvre de l’accord, était un arrêté présidentiel et deux circulaires de la Banque de la République d’Haïti que Martelly publierait après sa prise de fonction.

Le décret présidentiel a fixé un « prix plancher pour tous les appels internationaux entrants » à 0,23 $ par minute et a exigé que 0,05 $ par minute soit « remis au gouvernement ». Ce décret avait prévu d’ajouter également des frais de 1,50 $ aux envois de nourriture et d’argent en Haïti depuis certains pays, y compris les États-Unis.

Dans leur plainte, ces citoyens haïtiens affirment que chaque concerné avait retenu une partie des frais, plutôt que de transmettre le montant total au Trésor public haïtien. “Martelly et ses successeurs Jocelerme Privert et Jovenel Moise, pendant leurs mandats respectifs, ont également profité personnellement des honoraires”, poursuit la plainte, qui cite en exemple, le Chanteur du groupe Sweet Micky, qui aurait utilisé l’argent de la taxe de transfert pour se procurer d’une maison au bord de la plage.

A travers cette action en justice, ces citoyens haïtiens vivant aux États-Unis voulaient avoir une idée de la somme qui a été réellement collecté et où ces fonds ont été versés. “Il n’y a jamais eu de programme d’éducation gratuite pour les enfants haïtiens. Nous allons demander au tribunal une injonction pour empêcher les parties de collecter les fonds à l’avenir”, a déclaré Rodney Austin, l’avocat des plaignants, dans une entrevue accordée à Haïtian Times.

Des accusations prises très aux sérieux par la justice, et un procès a été lancé. Mais en 2021, soit 3 ans après le dépôt de la plainte, un tribunal régional avait rejeté les allégations, au motif que les tribunaux américains ne pouvaient pas se statuer sur l’affaire d’un autre pays.

Jeudi 31 mars dernier, soit environ 4 ans après, 3 juges de la Cour d’Appel des États-Unis dans le 2e district de Manhattan, ont renversé cette décision antérieure et exigent la poursuite du procès. Dans cette décision de 29 pages, le panel de juges décide que les compagnies de transfert et téléphoniques opérant en Haïti et les ex-présidents cités dans cette affaire, doivent faire face à une nouvelle poursuite aux États-Unis.

Selon le journal Haïtian Times, la décision a établi que les plaignants pouvaient toujours déposer une plainte en vertu du droit américain, annulant le rejet précédent. Les juges ont demandé au tribunal de réexaminer les 15 réclamations fondées sur le droit des États qui avaient été déposées précédemment dans le cadre de la poursuite de l’affaire.

Pour l’instant, les plaignants attendent d’autres instructions du tribunal, y compris la nécessité de fournir d’éventuels documents supplémentaires dans l’affaire.

Notons que dans le cadre de ce procès, les compagnies Unitransfer et Unibank sont représentés entre autres par les avocats Perlman, Bajandas, et les cabinets Yevoli & Albright et Stinson. La Natcom est représentée par Macx L. Jean-Louis de New York, tandis que le gouvernement haïtien ainsi que les anciens Chefs d’Etat sont représentés par le cabinet d’avocat dirigé par Me Madsen.

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