Criminalité en Haïti : l’Etat haïtien, entre « laisser-aller » et « laisser- faire »
Même s’ils se diffèrent les uns des autres, les meurtres en série auxquels nous assistons, ces dernières semaines, font partie de l’insécurité généralisée qui gangrène la société haïtienne. Mais le caractère singulier de chacun de ces meurtres, peut-il s’expliquer par une nouvelle approche du pouvoir en place de brouiller les pistes avec des morts qui ne se ressemblent pas ?
Nous avons l’habitude de regarder les séries policières où les enquêteurs essaient d’établir un lien entre les homicides, afin de se mettre sur la piste du meurtrier. Par cette démarche, ils essaient de déterminer le mode opératoire du tueur.
En Haïti nous sommes habitués aux homicides et aux massacres. Chez nous, le crime est devenu normal au regard de l’approche de Durkheim sur le normal et le pathologique. Néanmoins, les meurtres enregistrés au cours de ces dernières semaines nous interpellent tous. Ils n’ont rien du « déjà-vu ».
Deux jeunes danseurs retrouvés morts (Nancy Dorléans et Sébastien Petit), un couple abattu chez lui à Péguyville (Farah Martine Lhérisson et Lavoisier Lamothe), un haut cadre de la BRH et sa compagne tués dans une rencontre politique à Delmas 75 (Norvella Bellamy). A vue d’œil, on ne peut pas relier ces meurtres. Les mobiles semblent être différents l’un de l’autre, mais tous, sont la conséquence logique du « laisser-aller » et du « laisser-faire » de l’État haïtien. Ce dernier a donné carte blanche aux bandits pour faire régner la terreur dans le pays.
L’insécurité à laquelle est confrontée la société haïtienne depuis des lustres, est le fruit des choix que nous impose la communauté internationale à travers des élections frauduleuses, et des véritables détenteurs de la richesse du pays, hostiles à tout changement.
Pour nous autres profanes, ces meurtres précités semblent n’avoir aucun lien, tant les personnes tuées sont à l’opposée l’une de l’autre. Mais nous avons l’intelligence de comprendre que c’est une nouvelle stratégie du gouvernement en place de semer le deuil, mais aussi, d’éliminer les indices, pouvant faire le lien entre les meurtres.
Aujourd’hui, il faut faire preuve de vigilance pour ne pas être la prochaine victime de l’insécurité grandissante, dont l’État est le principal garant. Un État qui exerce la violence pour empêcher des nobles citoyens de s’exprimer sur l’insécurité qui endeuille les familles haïtiennes, qui participe à la prolifération des gangs, en les fournissant armes et munitions, qui libère également des prisonniers condamnés (pour meurtre, viol, vol, kidnapping etc.), ne dirige plus, mais participe à son déclin.
L’heure est grave ! Elle est à la mobilisation citoyenne. À nous de prendre en main notre destinée, et lutter pour un État de droit dans lequel l’État haïtien sera soumis à la loi.
Ricot Saintil / HIP