Crise au Centre de réinsertion des mineurs : une détention inhumaine
Le Centre de réinsertion des mineurs en conflit avec la loi (CERMICOL) à Delmas 33, initialement conçu pour héberger une centaine d’enfants détenus, est aujourd’hui en proie à une situation chaotique. Construit pour offrir une éducation morale, civique et professionnelle aux jeunes délinquants, ce centre est désormais surpeuplé et dysfonctionnel, accueillant 337 prisonniers dont des hommes, des femmes et des enfants des deux sexes. Cette situation alarmante met en évidence les graves manquements des autorités pénitentiaires haïtiennes à garantir des conditions de détention dignes et sécurisées.
Les récents événements au pénitencier national et à la prison de Croix-des-Bouquets, où des bandes armées ont provoqué l’évasion de milliers de détenus, ont forcé le transfert de nombreux prisonniers au CERMICOL. Actuellement, des prisonniers, y compris 70 individus provenant du pénitencier national, sont entassés dans des salles initialement destinées à la formation des mineurs. Cette cohabitation forcée entre criminels endurcis, enfants et détenus en attente de jugement accroît le risque de violences sexuelles et autres abus, comme l’ont dénoncé plusieurs organismes de défense des droits des prisonniers.
L’infrastructure du CERMICOL n’est pas conçue pour supporter une telle pression. Les blocs sanitaires et les salles de douche sont insuffisants pour le nombre de détenus présents, aggravant les conditions hygiéniques, notamment pour les femmes. Des témoins ont décrit des conditions particulièrement préoccupantes pour les détenues, soulignant un manque flagrant de respect des standards de dignité humaine.
La situation actuelle au CERMICOL va à l’encontre des lois haïtiennes de 1952 et 1961 qui stipulent que les mineurs doivent être placés dans des institutions publiques surveillées, offrant une éducation corrective. Jude Chery, président de l’Association des volontaires pour la réinsertion des détenus en Haïti (Avred-Haïti), déplore la disparition progressive des espaces dédiés aux activités éducatives et récréatives des jeunes détenus. Depuis 2019, il accompagne les jeunes dans l’apprentissage de métiers manuels comme le recyclage des plastiques et la fabrication de produits chimiques. Aujourd’hui, ces programmes sont interrompus, privant les jeunes de toute activité formatrice et scolaire.
Face à cette situation critique, il est impératif que les autorités haïtiennes prennent des mesures immédiates pour désengorger le CERMICOL et restaurer sa mission initiale. Des solutions alternatives doivent être trouvées pour héberger les détenus adultes et ceux en détention préventive afin de protéger les enfants et de garantir leur réinsertion sociale.
Les conditions actuelles du CERMICOL constituent non seulement une violation des droits des enfants détenus, mais aussi une menace pour la sécurité et la dignité de tous les prisonniers. Une intervention urgente est nécessaire pour rétablir des conditions humaines et sécurisées dans ce centre de détention.