Droits Humains -CEP

Désignation au CEP : des organisations de droits humains fantômes choisit un représentant

La Plateforme des organisations haïtiennes des droits humains (POHDH) a publié un mémoire décrivant en détail les irrégularités et le dysfonctionnement qui ont marqué le processus de sélection d’un représentant du secteur des Droits Humains pour intégrer le Conseil électoral provisoire (CEP). Ce processus, organisé conjointement avec l’Organisation citoyenne pour une nouvelle Haïti (OCNH) sous l’égide du Conseil Présidentiel de transition (CPT), est accusé d’avoir été faussé et manipulé, notamment en faveur du candidat Gédéon Jean.

Dès le départ, la POHDH avait soulevé plusieurs préoccupations concernant la transparence et l’impartialité du processus. Néanmoins, malgré les efforts de collaboration avec l’OCNH, des tensions ont rapidement surgi, particulièrement lors de l’élaboration des critères d’éligibilité et des modalités de traitement des dossiers des organisations candidates.

La situation s’est aggravée lorsqu’en août 2024, une rencontre initialement prévue pour discuter des avancées a été boycottée par l’OCNH, qui a préféré répondre à une convocation du cabinet d’un conseiller présidentiel. Cela a conduit la POHDH à exprimer des réserves sur l’ingérence politique de certaines personnalités, ce qui compromettait davantage l’intégrité du processus.

Malgré les objections de la POHDH, le CPT a enjoint les deux organisations de finaliser la sélection avant le 14 août 2024. Cependant, la POHDH a constaté que des informations confidentielles relatives aux organisations candidates avaient été divulguées à l’équipe de campagne de Gédéon Jean. Cette fuite a renforcé l’idée que le processus était largement biaisé.

En dépit de ces irrégularités, l’OCNH, avec la complicité de membres du CPT, a organisé une « farce », selon la POHDH, qui a mené à la nomination de Gédéon Jean comme représentant des Droits Humains au CEP. La POHDH a dénoncé cette mascarade, rejetant la validité de cette nomination.

La POHDH a également souligné que la majorité des organisations ayant pris part au processus de sélection n’étaient pas qualifiées pour représenter véritablement le secteur des Droits Humains. Parmi les 135 structures inscrites, beaucoup n’ont pas soumis les documents nécessaires, tels que leurs statuts, pour prouver leur engagement dans la promotion des Droits Humains. Certaines organisations étaient même affiliées à des secteurs féministes, communautaires, ou de jeunesse, mais sans rapport direct avec les Droits Humains, ce qui a été une source de préoccupation majeure pour la POHDH. Le 2 août 2024, une nouvelle organisation de droits humains est enregistrée. À peine trois semaines plus tard, le 26 août, elle est déjà incluse dans les discussions et les votes pour choisir des membres du CEP. Il en va de même pour d’autres organisations, créées dans la même période et dont personne n’avait jamais entendu parler auparavant. Cela pose de sérieuses questions quant à leur légitimité et à leurs véritables intentions.

Selon plusieurs acteurs de la société civile traditionnelle, ces nouvelles entités semblent avoir été montées de toutes pièces pour influencer le processus électoral. “Comment une organisation qui n’a aucune expérience dans la défense des droits humains, aucune action sur le terrain, et aucune reconnaissance publique peut-elle participer à un processus aussi crucial ?” se demande Jean-Gilles François, un activiste de longue date.

Face à cette situation, la POHDH a officiellement retiré sa participation, estimant que le processus était devenu une parodie de la démocratie et de la transparence. Elle appelle le CPT à revoir entièrement ce processus de sélection afin de garantir qu’il soit conforme aux principes d’impartialité et de justice, et que le représentant final soit véritablement issu du secteur des Droits Humains, avec une légitimité incontestable.

Le mémoire de la POHDH met en évidence la nécessité de restaurer la confiance dans les institutions et les processus électoraux en Haïti, à un moment où le pays a besoin de plus de transparence et d’intégrité dans sa gouvernance.

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