Économie : Quand le dollar devient une patate chaude en Haïti

Lors d’une conférence de presse le lundi 22 août 2022, le gouverneur de la Banque de République d’Haïti, Jean Biden Dubois, a annoncé de nouvelles mesures visant le renforcement de la gourde face à la montée vertigineuse du dollar américain dans le pays, dont l’injection de 100 à 150 millions de dollars dans cette perspective.

Cette déclaration a eu un effet de panique sur le marché des changes. Le dollar américain qui s’échangeait à 162 gourdes est passé en un rien de temps à 110 gourdes dans la région métropolitaine de Port-au-Prince. Certaines informations laissent croire que le taux était nettement en-dessous de ce barème dans les villes de province.

Depuis, certains bureaux de change font montre d’une réticence par rapport à l’achat du billet vert, pensant que la chute de sa valeur peut s’accélérer encore davantage dans les prochains jours.

Judith Jean-Baptiste habite à Delmas 3, elle déclare avoir eu toute les peines du monde, mardi dernier, pour changer un billet de cinquante dollars qu’elle conservait précieusement.
« J’ai arpenté tous les bureaux de change au niveau du bas de Delmas en vue de vendre mon billet de 50 dollars au taux fixé par la Banque de la République d’Haïti, personne ne voulait le faire, les rares bureaux qui acceptaient, voulaient le changer à un taux nettement inférieur à celui exigé par la BRH, explique Judith », soulignant qu’« après cette péripétie, je me suis résolu dès le lendemain à me rendre à Pétion-Ville, dans l’espoir de parvenir à cette fin. La réalité n’était pas totalement différente, j’y ai cependant trouvé un Cambiste qui a finalement a accepté de le changer presqu’au taux de la BRH », a-t-elle expliqué.

Ce tableau est presque le même, dans les différentes communes du département de l’Ouest et dans le villes de province. Là-bas, les maisons de commerce qui faisaient la chasse au dollar refusent, catégoriquement, de se faire payer en cette monnaie, autrefois très convoitée.

C’est le cas de Félix François habitant dans la ville de Jérémie, qui a vécu une situation similaire dans un magasin qu’il a l’habitude de fréquenter. Ce n’est un secret pour personne que les gens qui recevaient, autrefois, de l’argent de l’étranger via leur compte bancaire ou d’un proche venant des États-Unis, l’utilisaient par rapport à la fluctuation du taux de change.

« Dans cette optique, j’ai mis de côté quelques billets verts que j’étais dans l’obligation de dépenser, après l’annonce d’injection faite par le gouverneur de la Banque Centrale, arrivé au magasin de commerce, à ma grande surprise, les responsables m’ont déclaré qu’ils n’acceptent plus que les clients payent en monnaie étranger », a confié Félix François, soulignant que quelques jours plutôt ces mêmes responsables acceptaient à cœur joie de toucher en billets verts.
Ce qui a surpris le plus l’homme, c’est lorsqu’il a eu à faire face à une réaction peu probable, après avoir décidé d’échanger son billet de cent dollars chez un cambiste.
« Ce dernier m’a laissé comprendre qu’il échangeait le billet, si j’accepterais 98 gourdes pour un dollar, alors que le taux référentiel de la BRH est de 115 gourdes pour un dollar », a-t-il expliqué.

Certains voient dans les différentes sommes injectées par la Banque de la République d’Haïti sur le marché, une possibilité pour les spéculateurs, qui sont des chefs d’entreprise, des banquiers, d’engranger plus de profits au détriment des plus vulnérables. Ils en veulent pour preuve les 13.5 millions de dollars us injectés par la BRH pour les besoins des compagnies pétrolières pour freiner la rareté de carburant qui persiste de plus belle dans le pays.

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