Et si Ariel Henry n’est plus apte à diriger que se passera-t-il?

Dans l’état actuel des choses, il faut se poser toutes les questions pour essayer de comprendre la complexité de la réalité politique qui règne en Haïti depuis l’assassinat de Jovenel Moïse. Les qualificatifs ne manqueront pas pour décrire ce qui se trame dans le pays. On peut parler sans ambages de situation inédite, de chaos, de pourrissement, de vide institutionnel, d’impasse etc. C’est le même langage, mais avec des mots ou expressions différents. La situation, déjà chaotique sous Jovenel Moïse, a empiré avec sa mort et s’est détériorée à l’extrême avec Ariel Henry. La présence de ce dernier est encore plus problématique, parce qu’on ne peut se référer à aucun texte de loi pour expliquer sa présence à la tête du pays.

La constitution de 1987 en son article 149 prévoit la marche à suivre en cas de vacance présidentielle pour « quelque cause que ce soit », donc, même vacance découlée d’un assassinat est inscrit dans l’article 149. Cependant, Jovenel Moïse de son vivant n’a laissé aucune chance pour l’application de cet article. Il a manifestement rendu inopérationnel toutes les institutions qui devraient mettre en pratique les prescrits de l’article 149. Ainsi, son assassinat nous a précipité dans l’inconnu.

Dernière volonté de Jovenel Moïse, Ariel Henry ne remplit aucune condition pour être là où il est, compte tenu que celui qui devait l’investir dans ses fonctions a été assassiné sans avoir eu le temps de le faire. Donc, imposé par le blanc, il rend encore plus compliquer la situation du pays, parcqu’il n’ y a aucune loi à laquelle se référer pour comprendre sa présence au timon des affaires. Définitivement, il ne peut plus s’appuyer sur la fin définitive du mandat de Jovenel Moïse qui est arrivé à terme le 7 février 2022, même si constitutionnelement il avait pris fini le 7 février 2021. Donc, c’est véritablement par un accord politique qu’il faut passer pour résoudre les désaccords pour sortir le pays du désordre dans lequel il s’enfonce de jour en jour.

La nécessité d’un accord s’impose pour plusieurs raisons, et l’une d’entre elle, c’est parce qu’il n’ y a aucun texte de loi, même désuet, même inapplicable comme l’article 149 dans le cas de la mort de Jovenel Moïse, pour essayer de comprendre la situation d’Ariel Henry. Posons-nous cette question en toute rationalité pour comprendre l’imbroglio dans lequel nous sommes aujourdhui. Hypothétiquement, si Ariel Henry, n’est plus apte à mener l’action gouvernementale, s’il tombe malade, devient fou, délirant ou tout bonnement s’il est mort ou assassiné comme Jovenel Moïse, que faudra-t-il faire pour le remplacer?

Son comportement grotesque, arrogant et violent nous pousse à examiner son cas, sa place et son autorité à la tête de l’Etat. Point besoin de rappeler les circonstances de son arrivée comme premier ministre de facto, on nous l’a imposé de force. Et depuis, il est devenu une source de contradictions. Ayant à sa disposition l’appareil étatique, cherchant une certaine légitimité, il s’est associé avec certains hommes et femmes sans scrupules de l’ancienne opposition affairiste, réactionnaire, pour fabriquer un accord qui lui donne un pouvoir sans durée, mais avec une mission « jovenélienne », visant à réaliser un référendum pour l’adoption d’une nouvelle constitution pour enfin organiser des élections. Ariel porte le discours du président défunt, il veut achever l’œuvre inconstitutionnelle de Jovenel Moïse, mais dont les principaux auteurs intellectuels, cela veut dire ceux pour lesquels la nouvelle constitution sera profitable, tirent encore les ficelles. En clair, l’attitude jusqu’au-boutiste du premier ministre de facto est en total désaccord avec les urgences de l’heure dont la principale est la situation sécuritaire dégradante et intenable qui gangrène le pays. Un accord entre les désaccords est impératif pour sortir de la spirale de l’instabilité. Un accord est important pour définir clairement une feuille de route, tracer la voie à prendre pour ne pas sombrer dans le chaos.

Essayons de répondre à la question posée un peu plus haut. Si Ariel Henry est en difficulté pour exercer le pouvoir pour quelque cause que ce soit, que va-t-il se passer ? On se retrouvera encore une fois dans une impasse, parce que tout simplement, il n’a pas de mandat bien défini. Ce que lui donne l’accord du 11 septembre ne prend pas en compte les enjeux de l’heure, il ne se voit pas comme étant un élément de la crise, il se fait des illusions sur son véritable pouvoir, il se prend bien plus que Jovenel Moïse qui se plaçait tout juste après Dieu. A son âge, il peut se passer plein de chose, il peut perdre la tête, comme c’est déjà le cas, puisqu’il n’est plus lucide, il peut être frappé par la maladie, donc incapable de continuer à se masturber en public, ou bien il peut finir comme Jovenel Moïse, c’est-à-dire, être assassiné par ses pairs, trahis par ses maîtres, ou vendu par ses amis. Dans tous les cas de figure, c’est le pays qui en sortira perdu, c’est Haïti qui va encore se retrouver à la merci des américains, qui depuis plusieurs années, ont fait le choix de soutenir l’indécence, la corruption et livrer le pays entre les mains des gangs. Pour toutes ses raisons et bien d’autres encore, seul un accord dans lequel est pris en considération les urgences de l’heure et l’avenir à dessiner, peut nous sortir du bourbier dans lequel nous pataugeons depuis quelques temps.

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