Insécurité : la foi des « Pitit Manman Mari » à l’épreuve du chaos
Cette année, la neuvaine dédiée à l’Immaculée Conception, un moment fort de la dévotion catholique en Haïti, a été profondément marquée par la violence qui gangrène le pays. Prévue initialement au parc Saint-Thérèse de Pétion-Ville, elle a dû être annulée en raison des menaces sécuritaires. Mais cette annulation soulève une question : les « Pitit Manman Mari » ont-ils réellement perdu la bataille ?
La neuvaine, un rendez-vous religieux emblématique rassemblant des dizaines de milliers de fidèles, a longtemps été un symbole de communion spirituelle et de foi inébranlable. Cependant, l’insécurité galopante a contraint la paroisse universitaire Notre-Dame de l’Immaculée Conception à renoncer à ce grand rassemblement.
Dans une lettre adressée au Père Frantzy Petit-Homme, la Commission municipale de Pétion-Ville a demandé l’annulation des activités religieuses publiques, arguant de la nécessité de protéger les citoyens face à des menaces réelles. Cette décision a été motivée, entre autres, par des informations faisant état de plans d’attaques de groupes armés prêts à infiltrer le rassemblement.
Malgré cette décision difficile, l’Église a choisi de s’adapter. Dans une note, le Père Petit-Homme a exprimé ses regrets auprès des fidèles, tout en affirmant que l’événement serait maintenu sous une autre forme. Les célébrations auront lieu en ligne via la chaîne « Pitit Manman Mari TV », et des offices en présentiel se tiendront à la paroisse Notre-Dame du Perpétuel Secours à Delmas 75.
Cette flexibilité illustre la résilience de l’Église face à l’adversité. En déplaçant ses célébrations sur des plateformes numériques et en maintenant des offices limités, elle montre que la foi peut s’adapter sans se compromettre.
Le slogan de la paroisse, « Pitit Manman Mari pa janm pèdi batay », prend ici tout son sens. Si la neuvaine a été annulée sous sa forme traditionnelle, l’essence de cette célébration demeure vivante. L’Église ne voit pas cette décision comme une défaite, mais comme une manière de protéger ses fidèles tout en continuant à témoigner de sa foi.
Dans le chaos sécuritaire qui enveloppe le pays, l’Église rappelle que la prière, même dans l’adversité, peut être un outil puissant pour résister. La tenue de la neuvaine en ligne et en présentiel, bien qu’à une échelle réduite, est une preuve que les croyants refusent de céder à la peur.
Alors que Haïti traverse une période sombre, cette capacité d’adaptation et cette volonté de maintenir une lueur d’espoir témoignent de la force de la foi dans un pays qui, malgré tout, continue de se battre pour sa survie spirituelle et sociale. Les « Pitit Manman Mari » n’ont pas perdu la bataille : ils luttent autrement, avec la foi comme bouclier.