Justice : Jovenel Moïse et les victimes de La Saline, des destins liés

Déjà un an depuis que Jovenel Moïse a été brutalement assassiné en sa résidence privée. Comme toutes les victimes de la machine infernale du crime organisé et d’Etat dans ce pays, l’enquête sur son assassinat est au point mort. La justice dont il avait fait son marchepied, n’a ni l’indépendance, ni la capacité, ni les moyens de sa politique pour instruire son dossier convenablement.

Le premier anniversaire de ce magnicide arrive dans un contexte de déstructuration totale de l’organisation du pouvoir en Haïti, d’affaiblissement de l’institution judiciaire, d’impuissance de la PNH face à la toute-puissance des gangs et le grand banditisme d’Etat. Pour avoir été le garant de l’impunité, le protecteur et le fédérateur des gangs, principal responsable du déclin et de la faiblesse de nos institutions, Jovenel Moïse se retrouve six pieds sous terre comme le bâtonnier de Port-au-Prince, Me Monferrier Dorval, Antoinette « Netty » Duclair, Diego Charles, Gregory St-Hilaire et toutes les victimes des massacres perpétrés à La Saline, Bel-Air, Martissant, Croix des Bouquets etc. Son sort et celui de ces citoyens susmentionnés, et de toutes les victimes de son quinquennat, sont intimement liés par le bordel qu’il a institué et laissé derrière lui.

Jovenel Moïse a rejoint le 7 juillet 2021 une courte liste de présidents haïtiens morts assassinés au pouvoir. Néanmoins, son assassinat relève du crime organisé, d’un crime d’Etat, selon le RNDDH. Tout comme lui, des gens ont été victimes du crime organisé en Haïti, c’est-à-dire que leurs assassinats ont été planifiés, qu’un plan d’exécution a été parfaitement bien élaboré, que ces gens ne sont pas morts par hasard, ils étaient des cibles. Les gens assassinés sont aussi victimes du crime d’Etat, c’est-à-dire, que des autorités de l’Etat ont commandité ces meurtres, qu’ils ont donné les moyens logistiques et financiers pour commettre ces forfaits. Ces crimes profitent à l’Etat lui-même.

Président de la République, Jovenel Moïse, à la lumière de la constitution, avait la responsabilité de combattre le banditisme, le crime organisé et le crime d’Etat. Il était de son ressort d’éviter les bains de sang dans les quartiers défavorisés, c’était sa responsabilité de traquer les bandits, de mettre sous les verrous les voleurs, les criminels, les corrompus, les marchands d’armes, les kidnappeurs et tous ceux qui ne respectent pas la loi. À l’opposé de tout cela, il a rendu caduc le parlement, fragilisé la justice, la rendant inefficace et enfin, il a donné carte blanche aux bandits en leur permettant d’élargir leur territoire et en les laissant agir en toute impunité.

Le premier responsable d’entre nous, Jovenel Moïse, n’a pas volé au secours des filles violées, des hommes brûlés vifs, décapités fusillés par les gangs, il n’a pas non plus pris la défense des sinistrés de Martissant, victimes de la guerre des gangs. Il n’a pas donné les moyens à la justice pour qu’elle fasse correctement son travail. Comment brusquement espérer que Jovenel Moïse trouvera justice pendant que de son vivant il n’avait rien fait pour rendre justice aux victimes broyées par l’insécurité? Sa mort tragique est le fruit de ses relations sulfureuses avec les différents chefs de gangs de ce pays, qu’ils soient armés ou pas.

Ayant réduit les institutions du pays à leur plus simple expression, Jovenel Moïse a laissé une Haïti totalement désarticulée et incapable d’aller de l’avant. Le sinistre président qu’il a été malgré lui ne mérite pas le triste sort qui lui a été infligé. L’imminent intellectuel, professeur, avocat Monferrier Dorval ne méritait non plus son triste sort; lui il a été lâchement assassiné, tandis que Jovenel a été victime d’un système qui l’a créé, qu’il a nourri et qui a fini par le trahir. Ce 1er anniversaire loin d’être une occasion de mettre en valeur le président qu’à été Jovenel Moïse, devrait être un moment de rupture aux mauvaises pratiques qu’il a incarnées de son vivant. À chaque fois qu’on parlera de justice pour Jovenel Moïse, les zombies des victimes de son quinquennat seront là pour nous rappeler le président irresponsable, complice, protecteur des gangs et garant du statu quo qu’il a été. Vivant ou mort, Jovenel Moïse, c’est du pareil ou même, parce que « c’est une mort qui n’inaugure rien, ne met fin à rien. Un cadavre pour rien, qui arpente, solitaire, la rue des pas perdus…» pour répéter Lyonel Trouillot

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