Le paradoxe haïtien ou la culture de l’oubli

L’actualité en Haïti n’est jamais essentiellement nouvelle.  » Il y a rien de nouveau sous le ciel « , cette expression d’origine religieuse traduit parfaitement le quotidien de la société haïtienne.

Les jours passent, la misère se fait de plus en plus pesante, les temps deviennent de plus en plus durs, mais les discours restent inchangés, quand ils ne sont pas totalement vides. De la campagne électorale de Jovenel Moïse jusqu’à aujourd’hui, son propos n’a pas changé d’un iota. Il ne fait que mentir à lui-même et au peuple haïtien. Le pire dans tout ça, c’est que nous sommes tous conscients que le locataire du palais national est un menteur, mais nous l’écoutons quand même.

Le paradoxe de l’actualité en Haïti, c’est qu’on ne se trompe jamais de la nature des événements. Qui ne savait pas que les bénéficiaires de la grâce présidentielle seraient des criminels notoires? Tout le monde le savait, mais on attendait leur libération pour en faire tout un plat. Qui ne savait pas que le soi-disant ministre de la justice et de la sécurité publique, Lucmane Delille n’allait pas dédouaner Jovenel Moïse de toute responsabilité dans la libération de ces criminels? On le savait, mais on attendait qu’il vienne le crier devant les caméras de la presse et en parler dans nos éditions de journaux.

Donc, nous vivons dans un pays où l’actualité n’est jamais nouvelle. C’est une répétition de ce qui a déjà été fait, de ce qui a déjà été dit. Ce sont les autorités qui font l’actualité. Elles l’orientent dans leur propre direction, elles la créent, elles la dessinent et elles la laissent aux medias qui l’apporte aux consommateurs ( la masse de la population).

Nous avons déjà par le passé assisté à la libération de criminels notoires, et nous avons crié au scandale, mais ces criminels courent encore les rues. Nous avons déjà assisté aux échanges de correspondances dans l’administration publique comme c’est le cas aujourd’hui entre l’OPC et le MJSP, mais elles sont restées sans suite.

Le paradoxe dans tout ça, c’est notre capacité permanente d’oublier et de passer à autre chose. Plus de débat sur le “Karavan Chanjman” de Jovenel Moïse, on est passé à autre chose. Plus de débat sur la dilapidation des fonds de “Petrocaribe”. Plus de débat sur le mandat des sénateurs…

Dans les prochains jours, on ne parlera plus de la durée du mandat de Jovenel Moïse, plus des criminels notoires graciés, plus de Coronavirus, on passera tout simplement à autre chose. Ainsi va la vie en Haïti !

Ricot Saintil / HIP

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