L’HUEH, poumon de la santé publique haïtienne, cliniquement morte ?
L’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH), communément appelé l’Hôpital Général, est plongé dans une crise sans précédent. Fermé depuis plus de six mois, il a été abandonné non seulement en raison du manque de ressources, mais aussi à cause de la montée des violences des gangs dans la capitale, paralysant ainsi toute activité dans la zone où il est situé. Cet hôpital, autrefois le principal recours des plus démunis, est aujourd’hui le symbole d’une déliquescence qui touche non seulement le secteur de la santé, mais aussi tout l’appareil étatique. On observe également que certains médecins et travailleurs de la santé pillent les équipements de l’hôpital, trahissant ainsi la mission de ceux qui devraient le protéger, selon un syndicat de l’HUEH. Depuis plusieurs décennies, malgré l’alternance des gouvernements, les problèmes de gestion, de corruption et d’abandon n’ont fait qu’aggraver la situation. Alors que les autorités se succèdent, les promesses de réforme ne se traduisent jamais par des résultats concrets.
L’HUEH a toujours été un pilier pour les couches les plus défavorisées de la société haïtienne, un refuge où elles pouvaient espérer recevoir des soins, même en temps de crise. Aujourd’hui, cette population se retrouve complètement abandonnée, forcée de chercher des alternatives dans un pays où l’accès aux soins est un luxe inabordable pour la majorité. Alors que l’hôpital demeure fermé, des malades meurent ou sont contraints de chercher des soins ailleurs, souvent dans des conditions précaires.
Des dirigeants déconnectés, les visites inutiles de Gary Conille
À son arrivée à la primature, Gary Conille a visité l’HUEH à deux reprises. Sa première visite, marquée par une scène dramatique où il marchait parmi les cadavres sous les balles des gangs, fut suivie d’une deuxième apparition médiatisée avec des photos prises pour illustrer un prétendu “contrôle” de l’hôpital. Cependant, il ne s’agissait que d’une opération de façade. Quelques semaines plus tard, des vidéos publiées sur les réseaux sociaux ont montré une réalité bien différente : l’hôpital était laissé en ruines, victime de pillages continus. Ces images ont mis en lumière l’incapacité du gouvernement à sécuriser ou à réhabiliter cet établissement crucial. Ironiquement, pendant que l’HUEH sombre, les dirigeants haïtiens fuient cette réalité. Beaucoup, lorsqu’ils tombent malades, ne se tournent pas vers les établissements publics mais prennent l’avion pour se faire soigner à l’étranger. Lesly Voltaire, président du Conseil présidentiel de la transition (CPT), par exemple, se fait régulièrement traiter en République dominicaine. Cette pratique reflète le fossé entre la classe dirigeante, qui échappe à la décadence du système, et la majorité de la population, qui reste piégée dans ce cercle vicieux de pauvreté et de privation de soins.
Un pillage organisé et systémique
Le directeur exécutif actuel de l’HUEH, Dr Jude Milcé, a récemment admis, dans une interview accordée à Haïti Infos Pro, que la corruption était profondément enracinée au sein de l’hôpital. Il a évoqué des efforts pour inventorier les équipements restants afin de préparer la réouverture de l’hôpital, mais il est resté prudent quant à ses chances de succès. Dr Milcé reconnaît que les personnes impliquées dans cette corruption, notamment certains médecins et responsables, continuent de jouer un rôle clé dans la prise de décisions. Cette réalité est encore plus accablante lorsque l’on sait que des médecins, censés être au service des plus vulnérables, sont accusés d’avoir détourné du matériel médical pour alimenter leurs cliniques privées. Le docteur Junot Félix accuse ses collègues d’avoir volontairement saboté l’hôpital pour faire prospérer leur propre business, aggravant ainsi l’effondrement de l’institution publique.
Beaucoup d’entre eux, au lieu de se battre pour maintenir les services de santé publique, ont choisi de quitter l’hôpital pour ouvrir des cliniques privées, souvent aux dépens des patients les plus vulnérables. Ils ont non seulement abandonné leur poste, mais ont également emporté avec eux du matériel médical et des médicaments appartenant à l’hôpital, privant ainsi les patients des soins nécessaires. Ces actes ne sont pas de simples dérives individuelles, mais bien un système organisé de pillage et de sabotage, où des médecins profitent de la situation pour se remplir les poches, au détriment de la population haïtienne. Par leur action, ils ont contribué à la déchéance de l’hôpital général, réduisant cet établissement autrefois vital à un lieu déserté et sans espoir.
Malgré l’omerta qui règne dans les milieux médicaux, certains osent briser le silence. Le docteur Junot Félix est l’un d’eux. Il a courageusement dénoncé ces pratiques destructrices, mettant en lumière la manière dont certains de ses confrères se sont appropriés les ressources de l’hôpital pour leur profit personnel. Sa voix est un appel à la conscience collective, un rappel que tous les médecins ne se sont pas égarés sur la voie de la corruption. Dr Félix appelle à une prise de conscience générale et à des actions immédiates pour redresser la situation. Il met en garde contre les conséquences désastreuses de ce pillage systématique, non seulement pour l’hôpital général, mais pour l’ensemble du système de santé haïtien.
Le cri d’alarme des syndicats et des médecins internes
Face à cette situation désastreuse, les syndicats de l’hôpital et les médecins, en particulier ceux du service interne, n’ont eu d’autre choix que de multiplier les grèves. Ils réclament désespérément des conditions de travail décentes, du matériel médical en quantité suffisante, et la fin des détournements de fonds et de ressources. Ces grèves, bien que nécessaires, sont le symptôme d’un problème plus profond : un État qui a échoué à assumer sa responsabilité de garantir l’accès à des soins de santé de qualité pour tous. Les revendications des syndicats sont un appel à l’aide, un cri de désespoir dans un océan d’indifférence.
La présidente du syndicat de l’HUEH, membre de la Fédération Nationale des Travailleurs de la Santé (Fenatras), Evelyne Frémont, tire également la sonnette d’alarme. Elle dénonce l’incapacité des dirigeants à apporter des solutions à cette crise. Selon elle, l’hôpital, fermé depuis plus de six mois, a vu tous ses équipements pillés, même les panneaux solaires qui alimentaient en énergie certaines sections de l’établissement. Elle partage les dénonciations du docteur Félix, affirmant que des responsables internes, en collusion avec des médecins, ont délibérément détruit l’hôpital au profit du secteur privé.
Un hôpital en reconstruction permanente
Depuis le séisme dévastateur de 2010, l’hôpital général est en reconstruction. Des millions de dollars ont été débloqués pour remettre sur pied cet établissement crucial, mais malgré ces fonds, l’hôpital n’a jamais pu fournir de services adéquats à la population. Cette situation soulève des questions troublantes sur la gestion des ressources et l’engagement des autorités à restaurer ce symbole de santé publique. Ce chantier interminable est devenu le reflet de l’état général du pays : de grands projets annoncés, mais rarement menés à bien. Pendant ce temps, les besoins de la population restent insatisfaits, exacerbant la crise sanitaire déjà critique.
Les victimes de cette trahison sont les Haïtiens eux-mêmes. Ceux qui, faute de moyens, dépendent des services de l’hôpital général pour leur survie. Aujourd’hui, ils se retrouvent sans accès aux soins de base, forcés de se tourner vers des cliniques privées inabordables ou de renoncer tout simplement à se faire soigner. Cette situation entraîne non seulement une augmentation des décès évitables, mais aussi une détérioration générale de la santé publique en Haïti. Les malades qui se rendent encore à l’hôpital général sont confrontés à des infrastructures dégradées, à un manque cruel de médicaments et de matériel, et à l’absence quasi totale de personnel qualifié. Leur désespoir est palpable, tout comme l’injustice qui leur est faite. Ils paient le prix fort de la cupidité de quelques-uns et de l’effondrement d’un système de santé autrefois fonctionnel.
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