Lutte contre les gangs armés : la PNH, une puissance bridée par ses propres failles
L’opération menée par la Police nationale d’Haïti (PNH) ce mardi 19 novembre 2024, à Pétion-Ville, illustre clairement une vérité souvent ignorée : Haïti n’a pas besoin de forces multinationales pour combattre l’insécurité. Avec une meilleure gestion, des moyens adéquats, et une réforme interne, la PNH peut seule répondre aux défis sécuritaires du pays. L’interception de deux camions transportant des individus armés, l’élimination de 28 présumés bandits et la saisie d’un important arsenal montrent que cette institution dispose déjà des compétences et des capacités nécessaires pour neutraliser les menaces criminelles.
L’opération de ce mardi, bien que partielle, démontre ce que la PNH est capable d’accomplir lorsqu’elle agit avec détermination et coordination. À Post-Marchand, Canapé-Vert, Delmas 60, et d’autres zones, les policiers ont traqué des criminels armés, saisi des munitions, un drone, et neutralisé des éléments dangereux. Ces résultats témoignent de leur expertise tactique et de leur capacité à mener des missions complexes.
Contrairement à l’idée largement répandue que seule une force étrangère pourrait ramener l’ordre, les faits montrent que ce n’est pas une question d’effectifs étrangers, mais plutôt de volonté politique et de moyens matériels. Une PNH bien équipée et soutenue serait plus efficace qu’une intervention multinationale souvent déconnectée des réalités locales.
Depuis plusieurs années, Haïti est régulièrement présenté comme un pays ayant besoin d’une intervention étrangère pour résoudre ses crises. Pourtant, les précédents de forces multinationales (comme la MINUSTAH) n’ont laissé que des résultats mitigés, souvent accompagnés de scandales et de violations des droits humains. Ces interventions coûtent cher, drainent des ressources qui pourraient être investies localement, et ne s’attaquent jamais aux causes profondes de l’insécurité.
La solution ne réside pas dans l’importation de troupes étrangères, mais dans la mise en valeur des compétences nationales. Les forces multinationales, aussi bien équipées soient-elles, n’ont pas la connaissance du terrain, ni la légitimité locale pour traiter les enjeux spécifiques d’Haïti. Elles risquent souvent d’aggraver la méfiance entre la population et les institutions.
Pour que la PNH devienne l’unique rempart contre l’insécurité, plusieurs axes d’amélioration sont nécessaires :
La PNH manque cruellement d’équipements modernes, de véhicules blindés, de technologies de surveillance et d’armes adaptées. Les criminels, souvent mieux armés, profitent de cette faiblesse. L’argent investi dans une force multinationale pourrait être utilisé pour moderniser la PNH et former ses membres.
L’existence de policiers sans état d’âme, susceptibles de collaborer avec des bandits ou de saboter les efforts de leurs collègues, affaiblit considérablement l’efficacité des forces de l’ordre.
Les opérations de ce mardi n’auraient peut-être pas abouti si des fuites internes avaient alerté les criminels avant leur interception. Ce problème structurel soulève des questions sur la nécessité d’un nettoyage en profondeur au sein de la PNH. Une force dépourvue d’agents corrompus ou complices serait en mesure de maximiser ses résultats et de restaurer l’ordre public.
La présence d’agents corrompus ou complices de gangs reste une menace majeure. Il est impératif de mener des enquêtes rigoureuses pour exclure les policiers sans état d’âme et restaurer la discipline au sein des rangs.
Le succès des opérations de ce mardi montre l’importance d’un renseignement efficace. Si la PNH parvient à mieux protéger ses informations internes, elle sera capable de frapper les groupes criminels de manière décisive et rapide.
La méfiance entre les citoyens et la police freine la lutte contre le crime. Une meilleure communication, des actions transparentes, et une véritable protection des témoins sont essentielles pour gagner la confiance des communautés.
Une police nationale, un espoir national
La réussite de cette opération montre qu’Haïti possède déjà les outils nécessaires pour combattre l’insécurité. L’appel à une force multinationale n’est pas une solution durable, mais un aveu de faiblesse. Ce pays a besoin d’investir dans ses propres institutions, comme la PNH, en leur offrant les ressources et la réforme nécessaires pour devenir la force qu’elles doivent être.
Il est temps de rejeter la dépendance aux solutions externes et de croire en la capacité des Haïtiens eux-mêmes à reprendre le contrôle de leur destin. Avec une PNH équipée, réformée, et soutenue, l’insécurité qui ronge le pays pourra être vaincue, non par des troupes étrangères, mais par les efforts d’une institution nationale renforcée.