Origines des gangs en Haïti : Aristide et Fanmi Lavalas accusés d’avoir engendré la crise actuelle
L’histoire de la violence en Haïti est complexe et enracinée dans des décennies de luttes pour le pouvoir et de crises socio-économiques. Aujourd’hui, une organisation canadienne accuse Jean-Bertrand Aristide et son parti, Fanmi Lavalas, d’avoir initié la formation des gangs armés qui plongent le pays dans l’insécurité actuelle. Selon cette organisation, la montée en puissance des bandes criminelles en Haïti remonte à la dissolution de l’armée par Aristide en 1994, une décision qui a laissé un vide sécuritaire, rapidement comblé par des groupes paramilitaires et des milices créées pour servir ses intérêts politiques.
Après le coup d’État de 1991 qui a renversé Aristide, une intervention américaine l’a rétabli à la présidence en 1994. Cependant, craignant une nouvelle tentative de renversement, il a dissout les Forces armées d’Haïti, perçues comme une menace pour son autorité. Pour contrer l’influence persistante des élites et des anciens militaires, il a soutenu la formation des « chimères », un réseau d’hommes jeunes et armés issus des quartiers pauvres, pour défendre son régime. Ce choix s’est avéré désastreux. Les « chimères » se sont transformées en gangs puissants, un fléau qui continue de ravager aujourd’hui les rues de Port-au-Prince.
Le terme « gang » ne capture pas toute la réalité de ces groupes armés. Fonctionnant davantage comme des organisations criminelles sophistiquées, ils sont devenus des outils de pouvoir pour les élites politiques et économiques du pays. Les gangs haïtiens ne se contentent pas de contrôler des territoires : ils sont aussi impliqués dans des activités économiques illégales, allant des enlèvements à des fins de rançon à la répression violente de l’opposition. Les gouvernements successifs ont souvent exploité ces groupes pour servir leurs propres intérêts, allant même jusqu’à les financer, comme en témoigne le soutien apporté au G9 sous l’administration de Jovenel Moïse.
Le G9, dirigé par Jimmy « Barbecue » Cherizier, illustre bien comment ces groupes armés se sont infiltrés dans le tissu politique du pays. Accusé d’être à l’origine du massacre de La Saline en 2018, Cherizier et son réseau ont continué à bénéficier de financements gouvernementaux, malgré les sanctions internationales. Ces alliances révèlent comment la violence en Haïti n’est pas simplement une question de délinquance, mais plutôt une stratégie délibérée pour maintenir le contrôle du pays.
La militarisation des groupes en Haïti ne date pas d’hier. Dès François « Papa Doc » Duvalier, le pays a vu la création des Tontons Macoutes, une milice paramilitaire utilisée pour écraser toute opposition. Cet héritage de violence et de répression a perduré bien après la chute des Duvalier, s’insinuant dans la politique moderne haïtienne et préparant le terrain pour les gangs actuels.
En 2004, un autre coup d’État a renversé Aristide, mais le vide laissé par son départ a été comblé par Michel Martelly, un président soutenu par les États-Unis, qui a renforcé les liens entre l’État et les groupes armés. La Base 257, un gang créé sous Martelly pour réprimer les manifestations à Pétion-Ville, illustre comment les leaders politiques ont utilisé ces forces pour maintenir leur emprise sur le pouvoir.
Aujourd’hui, la situation semble encore plus critique. Avec l’assassinat de Jovenel Moïse et la montée au pouvoir du Premier ministre Ariel Henry, le pays est plongé dans une crise sans précédent. L’économie est en chute libre, avec une inflation galopante et une pauvreté croissante. La police nationale, sous-équipée et en sous-effectif, est impuissante face à des gangs qui dictent leur loi dans de nombreuses zones.
Les racines profondes de la violence en Haïti, liées à l’histoire du pays et aux manipulations politiques, rendent toute tentative de rétablissement de la sécurité d’autant plus complexe. Pour démanteler ces gangs, il faudra aller bien au-delà des mesures traditionnelles de sécurité, en abordant les inégalités sociales et économiques qui alimentent ce cycle de violence.