Paralysie de la Justice : des détenus oubliés dans des conditions inhumaines
Le système judiciaire et les centres de détention en Haïti continuent de faire face à une profonde crise, exacerbée par des grèves récurrentes et la montée en puissance de l’insécurité. Le dernier rapport du Réseau national de défense des droits humains (RNDDH), publié le 7 novembre 2024, met en évidence les défaillances et les abus systémiques dans le traitement des détenus et l’administration de la justice.
L’année judiciaire 2023-2024 a été marquée par une succession de grèves du personnel judiciaire, paralysant de nombreux tribunaux. Ces interruptions ont fortement ralenti le déroulement des procédures, entraînant une accumulation de dossiers non traités. Dans certaines juridictions, notamment celle de Port-au-Prince, les infrastructures ont été gravement touchées par les violences des gangs, rendant l’administration de la justice quasiment impossible.
Le rapport souligne également les conditions alarmantes dans les centres de détention du pays. Les détenus souffrent de malnutrition, d’un accès limité à l’eau potable et aux soins médicaux, et de cellules surpeuplées. La propagation de maladies contagieuses, comme la tuberculose, est facilitée par ces conditions insalubres. La situation est particulièrement préoccupante dans l’Ouest, où plusieurs prisons ont été abandonnées ou attaquées, contraignant les autorités à utiliser des commissariats comme lieux de détention, dans des conditions dégradantes.
Malgré une baisse de la population carcérale de 35,6 % entre octobre 2023 et novembre 2024, le pourcentage de détenus en détention préventive reste quasiment inchangé, passant de 83,92 % à 83,54 %. Ce chiffre démontre une inertie dans le traitement des dossiers judiciaires et un manque d’efforts pour réduire la détention préventive prolongée. Les détenus attendent souvent des années avant d’être jugés, et les audiences criminelles organisées au cours de l’année n’ont eu qu’un impact minime sur la surpopulation carcérale.
Face à ces constats, le RNDDH appelle les autorités à prendre des mesures concrètes pour redresser le système judiciaire. Le rapport recommande une reprise des infrastructures contrôlées par les gangs, une certification rigoureuse des magistrats pour renforcer leur intégrité, et une organisation d’audiences régulières afin de réduire la détention préventive. Le RNDDH exhorte également les autorités à améliorer les conditions de détention, garantissant ainsi aux prisonniers un minimum de dignité humaine.
Ce rapport illustre le besoin urgent de réformes pour rétablir la justice en Haïti. Dans un contexte où l’insécurité règne, il est impératif que l’État prenne des mesures pour restaurer l’autorité judiciaire et offrir aux citoyens la protection légale qui leur est due.