Port-au-Prince : le défi de l’expertise des véhicules délabrés

Dans la région métropolitaine de Port-au-Prince, la voie publique regorge de véhicules en mauvais état, assurant plusieurs trajets. Dans l’indifférence des instances de contrôle, les occupants de ces automobiles prennent leur mal en patience.

Le transport public est assuré par différents types de véhicules sous de noms variés comme les camionnettes, les bus, les minibus, Pappadap, les Bwa-Fouye, les Tap-Tap et les Kanntè. Ces véhicules  se retrouvent à l’intérieur comme à l’extérieur dans des états déplorables. Durant ces dernières années, dans les différentes communes de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, la congestion automobile demeure un casse-tête pour le trafic public. Avec l’augmentation de la flotte des véhicules en circulation, conjuguée à l’absence de nouvelles infrastructures routières modernes, le calvaire des occupants des autobus publics se poursuit. Dans certains quartiers de la capitale, prendre un autobus est devenu un véritable calvaire. En raison des longues files d’attentes, les usagers s’impatientent et s’exaspèrent en raison de la mauvaise qualité des véhicules. Sans feux n’arrières ni devant, les chauffeurs du transport public ont souvent tendance à provoquer des embouteillages inévitables.

Disposer d’une voiture dans un pays comme Haïti où la misère impose sa loi, s’apparente à un luxe réservé à des personnes soi-disant appartenant à la couche aisée de la société. Pour vaquer à ses activités quotidiennes, la majorité de la population a eu recours au transport public.  Malheureusement, le transport public, mal organisé, plonge dans l’inconfort les abonnés de ce secteur. Entassés comme des sardines dans les autobus et les tap-tap, les passagers vivent la souffrance et le supplice de cette réalité.

Le calvaire des passagers

 Partout à travers le pays, les passagers déplorent les conditions dans lesquelles ils voyagent quotidiennement. Pierre, un commerçant qui habite à Christ-Roi, une zone où les voitures du transport public sont réputées délabrées, critique les autorités qui n’ont rien fait pour contrôler cette situation. « Lè m abiye pou al nan yon akivite   mwen pa pran machinn Kriswa, pou m pa sal », avance Pierre. Mwen pito peye plis kòb swa pou m pran taksi oubyen yon moto,  a fait savoir le citoyen.   Il y a de la nécessité pour l’adoption d’une vraie politique publique en matière de circulation dans le pays, conclut le sexagénaire.

C’est très difficile dans ce genre de voiture. Gade kòman andan yon machinn sal. Li fè cho, raconte une passagère. Parfois les morceaux de tôles dans les tap-tap mal construits me blessent, déchirent mes vêtements, souligne la passagère. Les voitures sont surchargées en plus l’embouteillage, ça, c’est un véritable calvaire conclut la jeune dame.

 Au su et au vu des autorités concernées, des chauffeurs assurant les trajets publics emplissent les allées des autobus, sans prendre en compte l’incommodité des occupants. Des véhicules disposés de deux rangées de bancs habilités à recevoir quatre (4) passagers, ont été autorisés à accepter le double. « Cette réalité s’observe généralement quand la nuit s’approche, quand le flux de véhicules publics décline dans le pic du trafic automobile dans la capitale ». 

Circuler à Port-au-Prince, un parcours de combattant

Voyager dans le transport public en Haïti est à la fois stressant et déshumanisant. Le mauvais état des véhicules se reflète également à l’interne, peut-on constater. L’environnement est malsain, les sièges sont délabrés et l’intervalle des sièges n’est pas respecté, contraignant les passagers à se recroqueviller pour s’adapter à cet inconfort. Malgré les dispositions de l’article 198 du décret du 26 mai 2006 créant le code de la route haïtienne, les propriétaires font peu de cas de ces dispositions, en organisant comme bon leur semble le trafic. Dans les bus, pas même une infrastructure pour étancher la soif du voyageur, ou un plan de secours pour les passagères victimes de malaise n’a été envisagé. « Dans la plus grande majorité des cas, les passagers en difficulté peinent à obtenir l’assistance nécessaire à leur cas », se plaint, un jeune passager.

S’agissant de la congestion des routes, la situation est préoccupante. Aux heures de pointe, embouteillages monstres et voies obstruées par des détritus irritent des passagers, obligés à faire la queue pendant des heures dans des lignes. « Ce qui met à l’épreuve l’intelligence et l’imagination des conducteurs résolus à emprunter des raccourcis pour fuir les bouchons ».

Le réseau routier haïtien n’est pas en mesure de répondre de manière satisfaisante à ses obligations élémentaires. Des travaux d’infrastructures sont réalisés de moins en moins par l’État haïtien. Depuis 20 ans, le service d’inspection est inexistant en Haïti, déplore le journaliste et PDG de l’univers auto-école, Theriel Thélus. Conséquences : les accidents de la route se multiplient. « Les autorités sont incapables d’assainir ce secteur », regrette le formateur en prévention routière Theriel Thelus. 

“Une voiture en mauvais état est le pire danger pour un passager”, avance Dr Garnel Michel. Pas de contrôle sur les routes, pas de contrôle dans les camions et les autres voitures, cela provoque des accidents. Dénonçant l’inefficacité des services de la circulation dans le pays, le coordonnateur de Stop Accident a appelé l’État à prendre ses responsabilités. 

Quid du service de la circulation ?

La Direction Centrale de la Police Routière (DCPR), communément appelé service de la circulation, tente toujours de reprendre le contrôle du secteur du transport public. Conscient du problème de ce secteur, le Chef de cabinet de la DCPR, le Commissaire divisionnaire Jean Yves Pierre, essaie d’expliquer le travail de la DCPR en vue de venir à bout les véhicules en mauvais état.

‘’On doit traquer les voitures en mauvais états à travers le pays », a déclaré le responsable, évoquant le décret du 26 mai 2006. Désormais, les véhicules du transport public en mauvais états seront bannis de la circulation’’, poursuit-il. La police routière ne cesse d’adopter des dispositions et tente vainement de mettre de l’ordre dans le secteur du transport en commun. Malheureusement, le mal parait endémique. « Il revient aux organes en charge de réguler le fonctionnement du secteur de prendre les dispositions qui s’imposent, afin d’optimiser l’offre de service ».

Bouton retour en haut de la page