Pour ou contre le referendum constitutionnel en Haïti, des Haïtiens aux Etats-unis se positionnent

Aux Etats-Unis, des Haïtiens qualifient « d’illégale » la démarche du Président de facto Jovenel Moïse d’organiser un referendum devant changer la constitution de 1987. Pour la grande majorité des compatriotes vivant sur le sol américain, par cette initiative le Chef de l’Etat vise à se protéger lui-même après son mandat, et changer le régime politique dans l’intérêt de son clan. Cependant, un autre groupe d’Haïtiens beaucoup plus restreint salue la démarche du Président Moïse et affirme avoir relevé de points intéressants à l’intérieur de l’avant-projet de la nouvelle constitution, dont l’intégration de la diaspora dans la vie politique du pays.

« La constitution de 1987 n’autorise en aucun cas, un changement de constitution par voie référendaire… » C’est la thèse épousée par Thelson Fleurismé. Pour lui, « le Président Moïse n’a ni titre, ni qualité pour lancer ce processus… ». Edens Deba est beaucoup plus tranchant, et s’en prend à Jovenel Moïse… Pour l’analyste politique très connu à New York, la démarche en elle-même est une gifle au peuple haïtien.

« L’exercice est faussé à la base, l’initiateur est dépourvu de toute légitimité », Roody Metellus le croit fermement et se dit catégoriquement contre le projet. Selon lui, le discours selon lequel la constitution serait responsable de tous les maux d’Haïti est archi faux. « Pour changer la constitution d’un pays, il faut du temps et un minimum de consensus », croit pour sa part Firmin Backer. L’un des points qui attire l’attention de ce professionnel haïtien qui évolue à Washington, c’est la concentration du pouvoir vers l’exécutif.

Dans cet avant-projet de constitution de 282 articles, il est prévu justement un régime présidentialiste et un pouvoir législatif constitué d’une seule chambre. Krissy Dor qui vit à New York voit dans cette réforme constitutionnelle, une stratégie du Chef de l’Etat d’esquiver toute poursuite judiciaire, après son quinquennat. Elle ne vit certes pas aux Etats-Unis, mais Marie Elsie Jeanty Chevalier décide de nous parler et se prononce contre ce projet. Selon la compatriote, émigrée au Canada depuis 32 ans, on ne peut pas parler de nouvelle constitution. Mme Chevalier appelle le peuple haïtien à bouder ce processus : « Pa okipe Jovenel. Mwen mande tout Ayisyen chita lakay yo, pa al vote nan koze referendum sa a…»

Malgré leur désaccord, ces Haïtiens croient que certains articles doivent être révisés en vue de s’adapter à la nouvelle réalité sociale. « Le contexte ne s’y prête pas, le projet doit se faire sans Jovenel Moïse», soulignent-t-ils.

Un avis qui n’est pas partagé par un autre groupe d’Haïtiens, qui parle d’une « initiative louable ». Nardine Joseph se dit pour le référendum constitutionnel qui, dit-elle, contribuera à des changements en profondeur. Maestro Junior Constant abonde dans le même et applaudit lui aussi l’initiative. Pour justifier sa position, ce jeune haïtien qui vit à New Jersey, cite en exemple le chapitre lié à l’intégration de la diaspora dans la vie politique du pays.

En attendant le vote du référendum prévu en juin prochain, le Comité Consultatif Indépendant poursuit ses séries de rencontres et de causeries autour du texte. Ici aux Etats-Unis, dans plusieurs grandes villes où il y a une forte concentration d’Haïtiens, des activités ont été organisées le weekend écoulé, pour marquer le 34e anniversaire de l’adoption de la constitution de 1987. Samedi, un sit-in s’est tenu devant le statut Toussaint Louverture à Miami, dans l’État de la Floride, pour dire NON à la dictature, et plaider en faveur du respect de la constitution en vigueur.

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