Trois ans après, l’ombre persistante de l’assassinat de Jovenel Moïse se fait sentir
Dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021, le président Jovenel Moïse a été brutalement assassiné chez lui. Une nuit macabre où l’angoisse et le désespoir se sont mêlés aux tirs incessants des assaillants. Ses appels désespérés à l’aide ont résonné dans le vide, laissant une question lancinante : comment un président a-t-il pu être laissé à une telle destinée, sans secours ?
Les premiers appels de détresse ont commencé aux environs de 1 heure du matin. Jovenel Moïse, en proie à la terreur, a tenté de contacter Léon Charles, le directeur de la Police nationale d’Haïti, son Premier ministre par intérim Claude Joseph, ainsi que les responsables de sa sécurité, Jean Laguel Civil et Dimitri Hérard. Même Vladimir Paraison, ancien responsable de la sécurité du palais, a été appelé en renfort. Malgré cela, aucune aide n’est arrivée. Le président et sa femme, Martine, ont dû affronter seuls l’horreur qui s’abattait sur eux.
À 3 heures du matin, il respirait peut-être encore. À 5 heures du matin, Claude Joseph déclarait à la radio avoir la situation sous contrôle. Mais à 10h37, Carl Henry Destin, juge de paix suppléant, arrivait sur les lieux pour constater l’irréparable. L’après-midi même, le corps sans vie de Jovenel Moïse était transporté à l’entreprise funéraire Pax Villa.
Quelques jours plus tard, des photos d’une autopsie, supposées être celles de Jovenel Moïse, faisaient le tour des réseaux sociaux. Le public pouvait voir l’étendue de la violence qu’il avait subie, ce qui a provoqué un sentiment de révolte même chez ses opposants politiques. Cependant, aucune note officielle n’a été publiée pour dénoncer cette diffusion.
Trois ans après, le pays est toujours en attente de justice. La Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) n’a pu transmettre son rapport que le 2 août 2021 au Commissaire du Gouvernement de Port-au-Prince de l’époque, Claude Bedfort. Ce dernier, sous l’influence du ministre de la Justice Rockfeller Vincent, avait convoqué le PM Ariel Henry pour répondre des appels téléphoniques placés au recherché Joseph Félix Badio le même 7 juillet 2021.
Depuis, cinq juges se sont désistés, craignant pour leur sécurité. Aujourd’hui, le juge Walter Wesser Voltaire poursuit les auditions, mais rien de concret n’a émergé malgré les nombreux indices. Les auditions incluent des accusés, des témoins, des hommes politiques, des agents de la fonction publique, des membres de la société civile, et des opposants de Jovenel Moïse. Malgré cette multiplicité, l’enquête stagne.
Parallèlement, les États-Unis ont extradé chez eux des présumés coupables et citoyens américains qui étaient incarcérés en Haïti. Parmi eux, Rodolphe Jaar a déjà été condamné à la prison à vie par la justice américaine. Pourtant, le principal meurtrier reste non identifié. Les autres accusés seront entendus en mai 2024.
Martine Moïse, en proie à ses contradictions, déclare désormais connaître les coupables, mais laisse à la justice le soin de faire son travail. Joverlein Moïse, le fils du défunt président, se distance des commémorations, craignant de se retrouver aux côtés des complices de l’assassinat de son père.
Aux Nations Unies, plusieurs pays s’inquiètent de la lenteur du système judiciaire haïtien dans cette affaire. Ils soulignent que cette impunité apparente envoie un mauvais message dans la lutte contre le banditisme.
Le 7 juillet est devenu un jour de deuil national, une date marquée par l’ombre de l’injustice. La lenteur du système judiciaire haïtien inquiète au-delà des frontières. Les témoignages de cette nuit révèlent une vulnérabilité déconcertante au sommet du pouvoir et une lenteur accablante dans la quête de justice. Trois ans après, l’assassinat de Jovenel Moïse continue de hanter la nation, un cri silencieux pour une justice encore absente.
Le peuple haïtien demeure dans l’attente, espérant que lumière soit faite sur cette nuit funeste et que justice soit rendue, non seulement pour Jovenel Moïse, mais pour la dignité de toute une nation.