Haïti-Social : retirer son extrait aux Archives Nationales, un véritable supplice

Se procurer un extrait des archives (actes de mariage ou de naissance) à la Direction Générale des Archives Nationales est devenu, ces dernières années, vraiment compliqué. L’obtention du précieux sésame à la Direction Générale des Archives Nationales d’Haïti à Delmas 75 relève quasiment de l’exploit pour les demandeurs qui sont au bout de leur peine. Beaucoup de demandeurs d’actes de mariage ou de naissance n’ont pas caché leur indignation. L’acte de naissance est une pièce fondamentale permettant aux citoyens d’accéder aux différents documents d’identité, mais c’est devenu une denrée rare. 

Il est déjà 10 heures du matin, nous sommes devant le bâtiment logeant les Archives Nationales d’Haïti à Delmas 75. Des dizaines de citoyens défilent dans l’espoir de repartir avec leur extrait qu’ils n’arrivent pas à se procurer même après 3, 6, 9 mois, voire une année d’attente, en dépit du fait qu’ils aient rempli toutes les conditions donnant droit à ce document d’identité. 

« C’est une véritable péripétie ! J’ai payé un extrait des archives, (extrait acte de naissance) à 700 gourdes le service, depuis septembre 2022 et nous sommes en juin 2023, je ne l’ai pas encore trouvé. A chaque fois que j’arrive au bureau on me dit que ce n’est pas encore prêt », a expliqué ce jeune homme qui frise la trentaine. 

Une dame qui avoisine la quarantaine fustige la direction des Archives Nationales qui oblige les demandeurs d’extraits d’acte de naissance ou de mariage à faire face au grand calvaire pendant plusieurs mois, sans aucune garantie d’obtenir un résultat positif. 

« J’ai fait une demande pour mon extrait d’acte de naissance, j’ai payé les frais exigés. Après plus de 5 mois d’attente un jour j’ai reçu un message m’autorisant à passer… Je pensais que j’ai été tirée d’affaire, mais ce n’était pas le cas. Mon calvaire ne faisait que commencer », a-t-elle témoigné. 

« Le papier qu’on m’a remis mentionnait qu’après recherche dans les registres mon acte n’a pas été enregistré. On m’a demandé d’apporter mon Acte de Baptême, je l’ai fait. On m’a exigé de refaire l’acte. Comment se fait-il que l’officier d’état te donne un document que l’Etat lui-même n’a pas reconnu, alors que j’ai fait tout ce que je voulais à l’aide de l’acte ? » s’est questionnée la jeune maman. 

Christian quant à lui a pu finalement récupérer son extrait d’acte de naissance aujourd’hui après avoir effectué plusieurs voyages au bureau. Ce dernier a produit sa demande le 10 mars 2022. Il juge que c’est inconcevable que les responsables des Archives Nationales prennent tout ce temps pour livrer un extrait d’acte de naissance. 

« Ti Josseline » ou les racketteurs, un raccourci pour atténuer la souffrance

Si par voie légale, il est presque impossible de se voir livrer le document des Archives Nationales d’Haïti en un temps raisonnable, pour atténuer leur calvaire des demandeurs d’extraits sont obligés de se courber aux exigences des racketteurs qui semblent avoir le secret ou la clé du bureau. 

« J’ai payé 10 mille gourdes à une personne qui m’a permis de facilement trouver mon extrait d’acte de naissance en 15 jours. Mais il avait exigé 15 millegourdes au préalable », nous a confié Suzanne (nom d’emprunt) qui était à bout d’un parcours jonché d’obstacles. Elle ne cache donc pas son contentement de disposer du document d’état civil tant réclamé. 

Depuis quelques temps un faible pourcentage des dossiers reçus fait l’objet d’une réponse favorable. Le bureau des Archives Nationales d’Haïti fait face à une demande exponentielle depuis l’annonce du Programme Humanitarian Parole des États-Unis, et les ressources humaines sont insuffisantes. De plus, l’institution fait face à de nombreuses difficultés, nous a confié une source.

L’extrait des archives est un document obligatoire pour le suivi administratif d’une demande de passeport. Beaucoup de personnes se ruent, à longueur de journée, vers le bureau des Archives Nationales pour retirer leditdocument. Au même titre que le passeport, l’extrait est de plus en plus rare d’être obtenu, malgré la création de la plateforme numérique DELIDOC, qui est d’ailleurs très critiquée. 

Notre source nous a aussi informé que bon nombre de demandeurs de passeport n’ont pas un extrait original. Elle nous laisse entendre qu’il existe un réseau spécialisé dans la production de faux extraits. Ils pointent du doigt des employés et des hauts responsables des Archives Nationales d’Haïti qui seraient de connivence avec des racketteurs qui s’y connaissent à matière de production de faux document.  

La rédaction de Haïti Info Pro a tenté en vain d’entrer en contact avec le Directeur Général des Archives Nationales d’Haïti, Jean Wilfrid Bertrand, pour pouvoir s’informer beaucoup plus de la situation de l’institution. 

En ce qui a trait aux péripéties que subissent quotidiennement des centaines de milliers d’Haïtiens pour se procurer leur document d’identité, les autorités sont pointées du doigt, car elles ne prennent pas leurs irresponsabilités. Des pièces comme l’extrait d’acte de naissance, de mariage, le passeport, le permis de conduire, le Carte d’Identification Nationale (CIN) entre autres, sont on ne peut plus indispensables pour le citoyen. Mais, se les procurer se révèle un véritable chemin de croix.

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