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Décrets sur l’ANI et la sécurité publique : l’OPC appelle l’exécutif à corriger son cahier

(HIP)- L’Office de la Protection du Citoyen recommande à l’exécutif de revoir le décret sur l’agence nationale d’intelligence (ANI) et celui portant sur le renforcement de la sécurité publique. Dans un avis rendu public cette semaine, l’OPC appelle à la révision ou l’élimination de plusieurs articles. Dans le cadre de l’élaboration de ces documents, l’office plaide en faveur de l’implication du Parlement.

Se basant sur une analyse faite autour de 5 points essentiels, l’OPC démontre que le décret portant création, organisation et fonctionnement de l’Agence Nationale d’Intelligence (ANI), constitue une violation des principes généraux de droits humains et la sauvegarde de la démocratie. La subsidiarité, la proportionnalité, l’autorité de contrôle, la légalité des actes et la prestation de Serment, sont les éléments centraux de cet avis de l’office, qui s’appuie sur des instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme auxquels l’État haïtien est partie.

« Au lieu d’assigner l’ANI à un simple rôle marginal ou subsidiaire en matière de mission de police courante, les articles 5.9, 5.11, 5.13, 5.23 et 48 du Décret du 26 novembre 2020 confèrent pourtant aux membres de l’Agence des prérogatives pour agir comme de véritables agents de la police administrative et de la police judiciaire. Certains domaines d’action devraient être réservés exclusivement aux autorités judiciaires. Cela est inadmissible », a écrit l’OPC.

Aussi, l’office souligne que « les articles 49, 62 et 63 et 67 permettent à l’ANI de jouir d’une immunité de juridiction presque absolue dans l’ordre juridique national qui est incompatible avec le principe d’égalité citoyenne et avec la nature civile de l’État ». Il déplore l’absence de texte établissant une structure de contrôle pour éviter les éventuelles implications des Agents de l’ANI dans les cas de violations de droits humains ou toutes autres formes d’abus d’autorité.

« Dans toute société démocratique, l’individu quel que soit son statut, auteur d’une violation des droits humains ou de manière générale d’une infraction, est pénalement responsable et doit être poursuivi », rappelle l’institution autonome.

Sur la légalité des actes, l’Office de la Protection du Citoyen déclare que le décret sur l’ANI donne plein pouvoir aux agents de fréquenter tous les lieux. « Il s’agit là d’un des pouvoirs très étendus qui peuvent ouvrir le champ à de graves atteintes aux droits fondamentaux et surtout les agents ne sont passibles d’aucune juridiction », critique l’OPC dans son avis.

Concernant la prestation de serment des agents, l’Office déplore le fait que cette disposition n’apporte aucune précision sur la nature de l’autorité habilitée à recevoir la prestation de serment. « A cet effet, dans la mesure où ces agents mèneront des actions d’investigation de police judiciaire, il serait plus approprié que ladite prestation de serment ait lieu par devant le Commissaire du Gouvernement », croit l’OPC. Parallèlement, l’Office de la Protection du Citoyen (OPC), croit « qu’il est urgent, d’un point de vue démocratique basé l’existence des trois (3) pouvoirs, que ce choix soit entériné par le Parlement à travers une Commission Spéciale ».

S’agissant du décret sur le renforcement de la sécurité publique, l’Office de la Protection du Citoyen souligne que le document contient « des provisions qui peuvent mettre en danger certains droits fondamentaux de la personne humaine ». L’OPC cite en exemple l’article 5 du décret, stipulant que « toute personne coupable de port illégal d’armes à feu est passible d’un emprisonnement dont le nombre d’années correspond au nombre total de munitions retrouvées soit sur lui, soit dans les armes par lui portées illégalement ».

Pour l’Office, « cet article est dénué de sens ». « Comment peut-on condamner plus sévèrement un individu, détenteur d’un pistolet illégal contenant un plus grand nombre de munitions à celui d’un autre individu ayant en sa possession une arme à feu à longue portée avec moins de munitions ? », s’interroge l’institution dans son avis.

Fort de toutes ces considérations, l’OPC recommande au pouvoir exécutif de revoir les deux décrets. Cette révision, écrit l’Office, doit être effectuée « en tenant compte d’un plan global de sécurité ». Il appelle également le Chef de l’Etat à revoir les articles liés à la nomination du DG de l’ANI et la mission des agents, mais aussi, l’article 5 dudit décret. En ce sens, l’institution croit que le Parlement doit être impliqué, à travers une Commission Spéciale. Par ailleurs, l’Office de la Protection du Citoyen recommande l’élimination des alinéas 12 et 13 de l’article 1er du décret portant sur le renforcement sur la sécurité publique.

Notons que cet avis a été rendu public environ 2 semaines après que la Présidence eut sollicité, à travers une correspondance officielle, l’expertise de l’OPC en matière de droits humains. Cette démarche arrive dans un contexte où des membres de la société civile ainsi que des partenaires internationaux expriment leurs préoccupations suite à la publication de ces documents.

Haiti Infos Pro

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