Opinion: Est-ce la fin de l’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moise ? 

Une scène qu’on aurait imaginée dans un film hollywoodien dans les rapports entre les Etats-Unis et les pays du tiers monde, particulièrement les pays centroaméricains et caribéens, a été produite le mardi 31 janvier 2023, sans démonstration cinématographique en Haïti. Quatre détenus de la prison civile de Port-au-Prince, sous contrôle judiciaire, accusés dans l’assassinat odieux du président Jovenel Moise le 7 juillet 2021, ont été transférés aux Etats-Unis pour répondre aux questions de juges américains sur ce dossier.

Les rapports entre les Etats sont fondés sur des accords, contrats, traités et conventions. Comment ce transfert a-t-il été rendu possible ? Si Haïti était liée par un accord ou traité avec les Etats-Unis sur le transfert de prisonniers dans des circonstances précises, on comprendrait le bien-fondé d’une démarche similaire. C’est le cas de l’accord signé entre le président haïtien René Préval et la secrétaire d’Etat américain Madeleine Albright en 1997 sur les personnes impliquées dans le trafic de la drogue en Haiti. Malgré la signature de cet accord, l’extradition des personnes accusées dans le trafic de drogue suit une procédure spéciale.

Le juge Walter Wesser Voltaire a-t-il pris une ordonnance administrative permettant l’extraction des détenus James Solages, Joseph Vincent, Christian Sanon et German Rivera Garcia de la prison civile de Port-au-Prince ? En sa qualité de juge d’instruction, chargé de l’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moise, il est le seul capable de donner un ordre d’extraction de détenus incarcérés dans le cadre de ce dossier. De son côté, la direction de l’Administration pénitentiaire nationale (APENA) donne suite aux ordres d’extraction du juge d’instruction conformément à la loi. Le juge prend ses décisions au regard de la loi. Le juge Voltaire peut-il dans ses circonstances prendre une décision de la sorte ? Dans un sens comme dans l’autre, le transfert de ces quatre détenus aux Etats-Unis est un fait inédit dans les annales de l’histoire judiciaire haïtienne.

Aucun autre gouvernement des deux siècles de notre existence n’avait accepté que notre pays soit déshonoré de cette façon.

Avec quelle moralité, le juge Voltaire va continuer à enquêter sur le dossier de l’assassinat du président Jovenel Moise si c’est lui qui a donné l’ordre d’extraction des quatre détenus. Si l’ordre vient du pouvoir exécutif, il n’a d’autre choix que de plier bagages. Les nouvelles décisions du juge Voltaire dans le cadre de ce dossier permettront de comprendre le rôle joué par ce dernier dans le transfert des détenus. Est-ce la fin de l’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moise ?

Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, en sa qualité d’organe d’administration, de gestion et de délibération du pouvoir judiciaire va-t-il garder le silence sur ce dossier sans se prononcer en tant que Co dépositaire de la souveraineté nationale ? La Fédération des barreaux d’Haïti, les organisations de défense des droits humains et les associations de magistrats vont-elles fuir leurs responsabilités relatives à ce dossier d’intérêt public ? Ce scandale provoqué par le gouvernement américain dans le système judiciaire haïtien ne vise-t-il pas à bloquer l’enquête haïtienne sur l’assassinat du président Jovenel Moise ?   

Lemoine Bonneau

Bonneau2005@yahoo.com

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page