Légitime défense : le gouvernement passe de l’indifférence au cynisme, selon le Barreau de Port-au-Prince
Une note du Conseil de l’ordre des avocats du Barreau de Port-au-Prince blame la ministre de facto de la justice et de la sécurité publique, Emmelie Prophète Milcé, qui appelle la population à la légitime défense face à la terreur des gangs.
En référence à l’article 273 du Code pénal reconnaissant le droit de légitime défense, évoqué par la titulaire du MJSP, Emmelie Prophète Milcé, le Conseil de l’ordre déplore « que cette soudaine redécouverte des vertus de la loi ne manquerait-elle de paraitre ironique pour un gouvernement qui fonctionne dans l’illégalité permanente, n’était-ce la situation dramatique que nous vivons et qui ne prete pas à rire ».
Cette intervention inélégante de la ministre devra épargner la société ce morceau d’humour noir. Emmelie Prophète Milcé, qui encourage la légitime défense, devrait se montrer cohérente en prechant par l’exemple. Cette thèse va à contre-courant des pratiques des membres de l’équipe de facto qui au lieu de défendre leur domicile, comme ils le professent, ont eu la diligente adresse de chercher refuge dans des résidences plus sûres.
L’appel à la légitime défense du gouvernement est monté un degré plus haut dans le mépris vis-à-vis du citoyen, passant de l’indifférence au cynisme.
« En incitant implicitement les citoyens à faire face à des gangs munis d’armes de guerre et donc à se condamner à un suicide sans appel, le gouvernement semble avoir parié sur le caractère funeste de notre sort », critique le Conseil de l’ordre des avocats du Barreau de Port-au-Prince.
L’article 273 du Code pénal fait référence à un cas d’urgence où le citoyen coopère provisoirement au maintien de l’ordre. Néanmoins, le considère au rang d’instrument de politique pénale, conçu à l’origine comme une réponse à des situations isolées, conduirait à l’extension sans bornes de poches d’affrontements armés au sein de la société, en raison du principe de proportionnalité gouvernant la réaction légitime à l’agression. Au Conseil de questionner le bien fondé de l’appel. Est-ce à une telle perspective que nous sommes ici conviés ?
Dans la foulée, le Conseil dénonce le comportement de la ministre et de son équipe qui ont explicitement proclamé leur défaillance par l’appel à une intervention étrangère tout en continuant paradoxalement à se maintenir comme dépositaires des fonctions de maintien d’ordre.
En guise de conseil, le Barreau invite la ministre Prophète Milcé à se référer au Code pénal quand il s’agit de se dessaisir de ses responsabilités étatiques à mettre à profit toutes les ressources juridiques qu’offrent notamment l’article 73 dudit Code traitant des bandes armées.